Adolf Hitler et l’Allemagne nazie

Deux textes du livre de Traudl Junge sur la période d’après le bunker, dans une Allemagne en ruine.

Le premier texte aborde le thème de la providence. Et le second l’état d’esprit qu’il est préférable d’avoir lorsque l’on est en pleine tourmente.

Traudl, secrétaire de Hitler, s’est échappée du bunker après son suicide, et est arrivée à survivre miraculeusement au chaos général de Berlin (elle a 25 ans). En captivité chez les Russes, la chance va lui sourire car un Russe arménien interprète va la prendre sous sa protection de façon totalement désintéressée.

Durant les mois suivants, il est son ange gardien.

Extrait du livre : Dans la tanière du loup : Les confessions de la secrétaire de Hitler, de Traudl Junge (1920-2002) qui fut la secrétaire particulière d’Adolf Hitler de 1942 à 1945.

Traudl Junge n’est pas emmenée en Russie. La garde-t-on comme « témoin précieux » ? Ou bien les occupants la jugent-ils trop inoffensive pour la punir sérieusement ? Des questions qui ne peuvent être nettement clarifiées après coup. En tout cas, le destin lui veut du bien, surtout quand il lui envoie un Arménien, qui s’appelle Arkadi. L’homme habillé en civil travaille comme interprète pour la force d’occupation russe. Il la fait sortir une nuit d’octobre 1945 de la cave du Rudolf-Virchow-Institut et l’amène à la kommandantur russe de la Marienstrasse dans une cave plus grande. Sur le chemin, il dit à peine un mot, mais elle remarque quand même ses manières excellentes et sa façon recherchée de s’exprimer.
Autant l’homme lui parait inquiétant au début, autant elle lui est finalement redevable. Durant les mois suivants, il est son ange gardien, lui procure des vêtements, une chambre, des papiers, et même, par la suite, du travail. La seule restriction : elle doit rester dans la zone russe. Quand, une fois, il lui offre une tomate, la dénomination poétique « pomme de paradis » prend pour elle d’un seul coup un sens littéral.  « Arkadi m’a interrogée une seule fois à la kommandantur, tandis qu’un officier en uniforme était assis dans l’autre coin de la pièce. Je devais simplement raconter ce qui s’était passé pendant les derniers jours dans le bunker du Führer. (…) »

Elle passe à peu près une semaine dans une partie de la cave de la kommandantur de la Marienstrasse transformée en cellule, puis Arkadi décide : « Il faut que vous sortiez d’ici », et il réquisitionne dans la première maison venue une petite pièce dans laquelle elle habite désormais. Sa logeuse, d’abord hostile et qui, plus tard, se réjouit de la compagnie de Traudl, est Mlle Koch, professeur de piano.
Quand Arkadi, lors de « l’occupation de la chambre », vérifie si le lit est confortable, Traudl Junge éprouve un mauvais pressentiment. Mais Arkadi ne l’importune pas. Au lieu de cela, dans les semaines qui suivent, il veille à ce qu’elle soit engagée comme collaboratrice à la kommandantur, car il peut ainsi lui donner chaque midi un repas à la cantine. (…)

Il disait des choses complètement étranges, il parlait de Providence.

Elle se sent livrée à Arkadi et le redoute toujours. Mais, encore une fois, il la surprend. Il fait alors la prochaine démarche : « Il vous faut du travail. » Puis il lui fait faire une photo d’identité et établir des papiers à son nom. À partir du 10 décembre 1945, sur son intervention, elle travaille comme employée d’administration, plus tard à l’accueil et finalement au guichet de la caisse de la polyclinique de la Charité.  « Cet homme m’a sauvée tout à fait volontairement et il n’avait manifestement aucune intention personnelle en le faisant. Il disait des choses complètement étranges, il parlait de Providence. (…) » 

Elle finit par fuir la zone russe de Berlin et rentrer à Munich chez sa mère. Ensuite elle se lie d’amitié avec le mari d’une de ses amis : Karl Ude.
L’intérêt du texte ci-dessous est la phrase que j’ai mis en titre.

Attendre tranquillement jusqu’à ce que le mal soit passé.

Elle fait la connaissance de l’écrivain en 1948, quand elle trouve refuge avec sa mère et sa sœur dans la Bauerstrasse, à Schwabing. Karl Ude, en tant que demi-juif, a été persécuté sous le Troisième Reich. En 1933, on avait l’expulsé de l’université huit semaines avant son examen d’État. En 1941, il fut démobilisé de l’armée comme « indigne du service militaire ». Jusqu’en 1944, il dirigea une fabrique de toile pour peintres qu’il avait reprise à des parents juifs, puis, en tant que détenu d’un camp de travail, il lui fallut travailler dans une usine de sel.

En 1946, (…) il devient l’un des avocats les plus réputés du pays pour les indemnisations et les restitutions.  Ils ont évité toute conversation avec Traudl sur la période qu’elle avait passée auprès de Hitler, dit Ulla Raff. : « Nous voulions la ménager. Elle nous faisait de la peine parce que nous avons vu combien elle souffrait intérieurement. »

(…) C’était un démocrate exemplaire, mais à part cela un homme apolitique, décrit son fils Christian, l’actuel maire de Munich, et, pendant le Troisième Reich, il a attendu tranquillement jusqu’à ce que le mal soit passé. Certes, il a montré pendant toute sa vie un grand intérêt pour l’actualité, mais, par principe, il n’a pas pris position. Il était beaucoup trop diplomate pour cela. Par ailleurs, il s’est consacré au rôle d’artiste.

« Karl Ude avait des idées très libérales et démocratiques et, comme écrivain et homme de culture, il a beaucoup influencé ma pensée. Il savait bien sûr que j’avais été la secrétaire de Hitler, je l’ai toujours dit tout de suite aux gens avec qui j’avais à faire de plus près. »

Pour l’anecdote : Ceux qui sont sortis du bunker après la mort de Hitler avaient tous sur eux une capsule de cyanure, car la réaction des Russes était redoutée. Certains responsables allemands ont effectivement été torturés. Staline avait rendu la torture légale en Russie dans les années trente.
Traudl Junge raconte que durant sa fuite au sortir du bunker, la possession de cette capsule l’avait rassuré. Elle lui fut confisquée en prison. On lui avait aussi donné un pistolet mais avec conseil d’éviter de s’en servir.

Traudl Junge s’est mariée avec un officier durant la guerre, qui fut tué sur le front ouest.

Ce chapitre est en lien avec la venue prochaine de l’Antéchrist.
Au début Hitler était adulé par la foule, comme en témoigne l’extrait ci-dessous, puis quand la guerre arriva, il fut considéré comme une source de malheur et sa popularité disparut, mais c’était trop tard. Il en sera de même avec l’antéchrist : Extrait de différents messages :
L’Antéchrist arrivera et se présentera comme un homme de paix. Il sera le médiateur de la paix pendant la guerre. Si un homme prétend être votre sauveur et qu’un seul gouvernement mondial soutient son ascension, vous saurez que c’est l’antéchrist.

Des femmes hystériques emportaient des pierres que son pied avait foulées.

Extrait du livre : Dans la tanière du loup : Les confessions de la secrétaire de Hitler, de Traudl Junge (1920-2002) qui fut la secrétaire particulière d’Adolf Hitler de 1942 à 1945. Traudl Junge à 22 ans lorsqu’elle entre au service d’Hitler.
Ce livre a inspiré le film : La chute (2004). Une scène de ce film a donné lieu à de nombreux détournements parodiques. Voici la parodie sur le COVID

Depuis longtemps déjà, Hitler évitait de s’exposer à l’enthousiasme de la population. Bien entendu, pour de simples raisons de secret militaire, son quartier général était officiellement inconnu du peuple. Mais le lieu de résidence du Führer à Berlin aussi était gardé strictement secret.
Avant, le drapeau à croix gammée était hissé au-dessus de la Chancellerie du Reich, et les habitants de Berlin reconnaissaient aux allées et venues animées des voitures que le Führer séjournait dans la ville. Depuis quelques années, seuls les initiés savaient que le doublement des sentinelles devant les portails d’entrée signifiait la présence de Hitler. (…). Sur le Berghof, où des foules s’étaient auparavant massées devant la dernière porte avant la Berghofstrasse, personne ne se montrait.

Avant la guerre, les portes étaient ouvertes une fois par jour quand Hitler partait pour sa promenade, et les gens se précipitaient à l’intérieur pour border son chemin. Des femmes hystériques emportaient des pierres que son pied avait foulées, et les gens les plus raisonnables se comportaient comme des possédés. Une fois, un camion qui montait des briques au Berghof fut même pillé par quelques femmes toquées, et les pierres que ni les mains ni les pieds du Führer n’avaient touchées échouèrent comme précieux souvenirs dans les vitrines de la salle de séjour. De ce genre de dames arrivaient ensuite les lettres d’amour qui constituaient une grande partie du courrier qui arrivait à la Chancellerie du Führer.

En bilocation chez Hitler, elle lui montre une ville sur une carte de l’Europe, et elle lui dit : « Tu t’arrêteras là ! »

Yvonne-Aimée de Malestroit (1901-1951) est une religieuse augustine française.

Sous l’Occupation, elle soigne à la clinique de Malestroit aussi bien des blessés allemands que des parachutistes et des résistants (spécialement ceux du maquis de Saint-Marcel). Elle héberge clandestinement à la clinique le général Audibert (commandant de la région ouest de l’Armée secrète)et apporte une aide active à la Résistance.
Le 16 février 1943, comme elle en avait eu la prémonition, elle est arrêtée à Paris par la Gestapo au prieuré Notre-Dame-de-Consolationa et amenée à la prison du Cherche-Midi. Torturée, elle s’évade « miraculeusement » après avoir demandé, en bilocation, des prières au père Paul Labutte, son fils spirituel.

Rapporté par Emmanuel Maillard, Yvonne-Aimée de Malestroit raconte qu’elle s’est aussi rendue par bilocation chez Hitler. Celui-ci, surpris de voir une religieuse qu’il ne connaît pas, sort son revolver et tire. Elle se relève. Il tire une seconde fois. Elle ne faiblit pas. Elle lui montre une ville sur une carte de l’Europe, et elle lui dit : « Tu t’arrêteras là ! »

Après la guerre, le 24 juin 1945, elle reçoit la Croix de guerre avec palme, à Saint-Marcel. Le 22 juillet 1945, le général de Gaulle en personne lui remet la Légion d’honneur, à Vannes, pour avoir caché et soigné à la clinique soldats alliés et résistants bretons. Le 3 janvier 1946, les autorités lui décernent la médaille de la Résistance et la médaille de la Reconnaissance française.

Sa religion, c’étaient les lois de la nature. Tout ce qui est inapte à vivre et tout ce qui est faible est éliminé.

Extrait du livre : Dans la tanière du loup : Les confessions de la secrétaire de Hitler, de Traudl Junge (1920-2002) qui fut la secrétaire particulière d’Adolf Hitler de 1942 à 1945.

(…) Même si, dans ce petit cercle autour de la table, Hitler n’entamait pas de conversations sur la guerre et la politique, ses propos se multipliaient pourtant sur les grands soucis qu’il avait. Il s’adressait alors plus souvent à lui-même qu’à nous. Il arrivait régulièrement que son visage porte encore l’expression de colère rentrée et de dureté que la réunion précédente avait provoquée. « Avec des généraux incapables, on ne peut pas faire de guerre. Je devrais prendre exemple sur Staline, il nettoie son armée sans ménagements. » Puis, comme s’il s’apercevait seulement alors que nous, les femmes, ne comprenions ou ne devions rien comprendre à ces choses, il abandonnait ses idées sombres et se métamorphosait en charmant compagnon de table.

Des discussions sur l’Église et l’évolution de l’humanité

Quelquefois s’engageaient aussi des discussions intéressantes sur l’Église et l’évolution de l’humanité. Discussions, c’est peut-être trop dire, car n’importe quelle question ou remarque de notre part était pour lui l’occasion de commencer à développer ses idées, que nous écoutions alors.

Il n’avait aucune sorte d’engagement religieux mais considérait les religions chrétiennes comme des survivances d’institutions hypocrites et piégeant les hommes. Sa religion, c’étaient les lois de la nature. Il pouvait leur subordonner son dogme violent plus aisément qu’à l’enseignement chrétien de l’amour du prochain et de l’ennemi. :

« La science n’a pas encore éclairci de quelle racine provient le sexe des humains. Nous devons être le stade d’évolution supérieur de quelque mammifère qui s’est développé du reptile au mammifère, peut-être en passant par les singes, jusqu’à l’être humain. Nous sommes un maillon de la création et des enfants de la nature, et les mêmes lois valent pour nous que pour tous les êtres vivants. Et dans la nature, c’est la loi du combat qui domine depuis le début. Tout ce qui est inapte à vivre et tout ce qui est faible est éliminé. C’est d’abord l’homme et surtout l’Église qui se sont donnés comme objectif de garder artificiellement en vie précisément le faible, celui qui est incapable de vivre et le médiocre. »

Je regrette de n’avoir gardé de ces théories que quelques minuscules éclats et d’être dépourvue du charisme avec lequel Hitler nous expliquait ses idées. En regagnant nos baraques, nous discutâmes entre nous de l’exposé de Hitler, et j’étais fermement décidée à continuer à réfléchir à ces choses et à les noter. Malheureusement, dès le lendemain, il me fallut constater qu’en conversant avec mes amis, je ne pouvais restituer tout ce qui m’avait impressionnée et touchée le soir précédent que de manière confuse et vague. (…)

… comme hypnotisés.

De temps en temps, je voyais les conseillers, généraux et collaborateurs sortir avec une mine consternée d’un entretien avec le Führer, ils mâchonnaient de gros cigares et ruminaient sans fin. Plus tard, j’ai parlé avec plusieurs d’entre eux. Et bien qu’ils fussent plus forts, plus sages et plus expérimentés que moi, il leur est arrivé à maintes reprises de se présenter devant le Führer, armés d’une résolution de fer et de documents et arguments irréfutables, pour le convaincre qu’un ordre était impossible, une disposition irréalisable, et il commençait alors à parler avant même qu’ils aient terminé, et toutes leurs objections s’effaçaient, rendues absurdes par sa théorie.

Ils savaient que ce ne pouvait pas être juste, mais ils ne trouvaient pas la fourberie. Ils le quittaient, désespérés, renversés, doutant de leur point de vue précédemment si ferme et si péremptoire, comme hypnotisés. Je crois que beaucoup ont essayé de se défendre de cette influence, mais la plupart sont devenus las et dociles et ont ensuite simplement laissé aller les choses jusqu’à l’extrême fin.

Cela laisse présager beaucoup de sang.

Voici un extrait de l’autobiographie d’Albert Speer (1905-1981) : Au cœur du Troisième Reich. Chapitre 12 : Sur la mauvaise pente
Au départ, Albert Speer était l’architecte préféré de Hitler. Il devint ensuite en 1942 ministre de l’Armement et de la Production de guerre, ce qui lui coûta 20 ans de prison.

Vers le début du mois d’août 1939, en compagnie de Hitler, nous nous rendîmes en voiture au « nid d’aigle » du Kehlstein. Nous formions un groupe insouciant. (…)
Après le repas, Hitler appela autour de lui les hommes de son entourage : « Nous allons conclure un pacte de non- agression avec la Russie. Tenez, lisez ! Un télégramme de Staline. » Ce télégramme était adressé au « chancelier du Reich Hitler » et annonçait brièvement la conclusion d’un accord. (…)
Maintenant, pensait-il, il était arrivé assez haut pour que les coups du destin ne puissent plus l’atteindre. 

Cette nuit-là, dehors avec Hitler sur la terrasse du Berghof, nous assistâmes émerveillés à un étrange phénomène naturel. Pendant plus d’une heure, une aurore boréale extrêmement vive inonda de lumière rouge l’Untersberg, ce mont entouré de légendes que nous avions en face de nous, tandis que le firmament prenait les couleurs de l’arc- en-ciel. On n’aurait pu rêver mise en scène plus impressionnante pour le dernier acte du Crépuscule des dieux. Cette lumière donnait aux mains et aux visages de chacun d’entre nous une teinte irréelle. Ce spectacle nous rendit tous songeurs. S’adressant à l’un de ses aides de camp, Hitler dit tout à coup : « Cela laisse présager beaucoup de sang. Cette fois, cela ne se passera pas sans violence » (…)

Un mois après eut lieu l’invasion allemande de la Pologne : le 1er septembre 1939, ce qui provoqua l’entrée en guerre de la France et de l’Angleterre. Hitler espérait que ces deux pays resteraient neutres, puis prévoyait envahir l’URSS pour y bâtir des villes allemandes.

D’après l’autobiographie d’Albert Speer, le peuple allemand, (traumatisé par la guerre 14-18), ainsi que certains hauts dignitaires nazis (dont Göring et Goebbels), n’était pas du tout favorable à une nouvelle guerre, à l’issue incertaine et dont la plupart des chefs nazis n’avaient rien à gagner.

Cela me sembla un mauvais présage

Voici un autre extrait de l’autobiographie d’Albert Speer (1905-1981).

Chapitre : La Nouvelle Chancellerie du Reich. Elle fut inaugurée en janvier 1939.

Pour tenir les délais, on avait embauché quatre mille cinq cents ouvriers qu’on fit travailler en équipes de jour et en équipes de nuit. Il fallait y ajouter, dispersés à travers le pays, les quelques milliers d’ouvriers et d’artisans ayant fabriqué divers éléments. Eux tous, tailleurs de pierre, menuisiers, maçons, plombiers et autres artisans, furent invités à venir voir le bâtiment achevé dont, impressionnés, ils parcoururent toutes les salles. (…) Après le repas, Hitler demandait souvent qui, parmi les convives, n’avait pas encore vu la nouvelle Chancellerie, tout heureux quand il pouvait montrer à l’un d’eux le nouveau bâtiment. (…)

Hitler me combla d’honneurs : il organisa pour mes collaborateurs un déjeuner dans sa résidence, écrivit un article pour un livre sur la Chancellerie, me décora de l’insigne d’or du parti et me fit présent, avec quelques paroles timides, d’une des aquarelles de sa période de jeunesse. (…) Mais même à cette époque, il ne reniait pas les insignifiantes aquarelles de sa jeunesse, puisqu’il en faisait parfois présent en signe de distinction particulière.

Depuis des décennies, il y avait dans l’ancienne Chancellerie un buste en marbre de Bismarck par Reinhold Begas. Quelques jours avant l’inauguration, des ouvriers, dans le déménagement, le laissèrent tomber par terre et la tête se brisa. Cela me sembla un mauvais présage. Comme, en plus, je connaissais l’histoire, que racontait Hitler, de l’aigle impériale tombant du fronton de l’hôtel des Postes le jour même de la déclaration de la Première Guerre mondiale, je lui cachai cet accident, demandant à Breker de faire une copie exacte que nous frottâmes avec du thé pour la patiner.

À gauche, dessin du buste en marbre de Bismarck par Reinhold Begas. Les autres photos sont la chancellerie construite par Albert Speer et inaugurée début 1939.

L’horoscope et la Seconde Guerre mondiale

Extrait du livre : Histoire de la voyance et du paranormal de Nicole Edelman – Éditions du Seuil.

(…) Par-delà cette diversification, l’astrologie conserve ses fon­dements prédictifs liés à la construction d’horoscopes. De même, les prédictions sur l’avenir des relations internationales se multiplient pendant les années 1930. Celles qui relient les Centuries de Nostradamus et le futur du monde et surtout de l’Europe sont de plus en plus nombreuses. Maurice Privat fait ainsi du commentaire des Centuries un des sujets principaux de sa revue Nostradamus.

L’enjeu de cette publicité prédictive astrologique et son emprise probable sur l’opinion publique prennent une telle dimension politique que le ministère de l’Intérieur français commande des prédictions favorables à Maurice Privat. Elles paraissent en 1940 sous le titre (pour le moins malheureux au vu de la réalité) : 1940, année de grandeur française.

Le Dr Pigeart de Gurbert (alias Max de Fontbrune), médecin à Sarlat, avait découvert par hasard en 1934 les écrits de Nostradamus. « À la lecture de l’épître à Henri II prédisant que « la Romanie, la Germanie et l’Espagne […] feront diverses sectes par main militaire », il aurait acquis la conviction que Franco serait dictateur de l’Espagne, Mus­solini régnant déjà en Italie (« Romanie ») et Hitler en Allema­gne.

En 1934, le pronostic pouvait paraître hasardeux. Il contribuera au succès et à la notoriété de son auteur. Max de Fontbrune poursuit ses lectures et ses interprétations et publie en 1938 un livre de commentaires des Prophéties, signé Max de son pseudonyme. Dans ces Prophéties, il annonce la chute d’Hitler ; aussi, par crainte du dictateur nazi, le gouvernement de Vichy fait saisir le livre en 1940. En Allemagne, le souci de contrôle de ces prédictions est pris en charge par le puissant ministère de la Propagande.

Dans son journal en mai 1942, Goebbels écrit :
« [Nous avons établi un plan] qui démontre comment nous pourrions utiliser les occultistes dans notre pro­pagande. Les Américains et les Anglais tombent facilement dans ce genre de piège. Nous sommes donc en train d’enrôler tous les experts en prophéties occultes qu’il nous est pos­sible de trouver. Une fois de plus nous allons citer Nostrada­mus. »

C’est deux ans auparavant, au début de la guerre, que K.-E. Krafft s’était présenté au Bureau principal de la sûreté de l’État du Reich (RSHA). Il participa alors à la propagande nazie en prédisant le succès d’Hitler, rédigeant des horoscopes annonçant victoires et succès. Mais soupçonné de complot, il est déporté au camp.de concentration d’Oranienburg et meurt en janvier 1945, lors d’un transfert à Buchenwald.

Face à cette propagande, les Anglais ne furent pas en reste. En 1943, ils publièrent eux aussi, en allemand, des horoscopes des diri­geants nazis et de fausses revues d’astrologie. Loin d’une neutralité hautaine, l’astrologie est donc largement instrumentalisée avec une participation active de certains astrologues au développement de l’antisémitisme à la fin des années trente et pendant la Seconde Guerre mon­diale. (…)