Saint Luc et les icônes

(Vincent) Voici un chapitre sur Saint Luc car c’est lui qui le premier fit des peintures de Jésus et de la Sainte Vierge.
Avant de faire ce chapitre, l’univers des icônes était pour moi assez mystérieux. J’avais offert récemment une icône à des amies et j’avais été surpris par l’aspect visuel repoussant de l’image. Maintenant tout s’explique : Saint Luc, qui était médecin, ne fut visiblement pas très doué en dessin et ses peintures ont été recopiées. Son style graphique a même été imité un certain temps.

Maria Valtorta raconte la première représentation de Jésus mais je ne retrouve plus le passage. En revanche voici ce que raconte A.C. Emmerich.

Vision d’Anne Catherine Emmerich – 18 octobre 1820.

Les parents de Luc appartenaient à la classe moyenne et demeuraient devant Antioche : il les perdit de bonne heure. Il était très intelligent et d’un caractère vif et gai. Je le vis, comme il n’avait encore que douze ans, chercher des fleurs dans les champs et faire toute espèce d’observations.

Un tube semblable à une longue-vue

Il apprit à peindre en Grèce : je le vis dessiner sur les murs de grandes figures d’hommes debout. Quand il fut plus âgé, je le vis dans une ville égyptienne étudier la médecine et l’astronomie. Je vis qu’il portait pendu à son côté un tube semblable à une longue-vue et qu’il se réunissait souvent à de nombreux compagnons. Ils entraient dans l’intérieur de constructions en maçonnerie très élevées et montaient jusqu’en haut à l’aide de perches : il y avait là de petits sièges comme des chaises d’enfants, et ils regardaient à travers un tube qui était bien aussi gros qu’un tuyau de poêle.

Dans la ville où Luc étudia la médecine, se trouvait une maison remplie d’animaux et d’oiseaux malades qu’on soignait comme dans un hôpital. On faisait des expériences sur eux avec le suc qu’on extrayait d’herbes de toute espèce. Je vis que Luc se servait uniquement de remèdes végétaux et qu’il observait les astres quand il avait des malades à traiter. Plus tard je l’ai vu guérir beaucoup de personnes. Il traitait des gens qui semblaient être sans connaissance en leur soufflant sur la bouche et sur le creux de l’estomac et aussi en leur faisant des frictions. À cette époque il n’était pas encore chrétien.

Il reçut le baptême de Jean

Je n’ai jamais vu Luc avec le Seigneur lorsqu’il était sur la terre. Peu après le baptême de Jésus, il reçut le baptême de Jean et assista aux prédications de ce dernier, mais ordinairement il allait d’un endroit à l’autre pour exercer sa profession de médecin, et il n’avait que par intervalles des relations passagères avec les disciples. Je le voyais toujours beaucoup écrire, notamment sur les plantes : il portait sur lui des rouleaux, et prenait souvent des notes.

Je ne le vis pas non plus au commencement avec les apôtres ; il était vis-à-vis d’eux comme un étranger et s’enquérait d’eux de temps en temps, mais de loin et sans se réunir à eux. Lorsque le Seigneur alla de Jéricho à Samarie avant la résurrection de Lazare, je le vis dans les environs de Samarie : étant arrivé à l’endroit où le Seigneur avait séjourné quelque temps chez des bergers et où étaient restés les trois jeunes gens qui avaient accompagné Jésus en Égypte, je le vis se faire raconter plusieurs choses.

Je ne le vis pas venir à Béthanie lors de la résurrection de Lazare, mais prendre des informations à Jérusalem auprès de Nicodème et auprès de Joseph d’Arimathie qui était en secret disciple de Jésus, et qui avait été voir Lazare. Il eut aussi des rapports avec la mère de Jean Marc, et après la mort de Jésus, avec Simon de Cyrène qui s’était converti : je le vis surtout en relations intimes avec Cléophas qui lui-même ne fut ouvertement disciple du Seigneur que peu de temps avant sa mort. Luc douta longtemps, et ce ne fut qu’à la rencontre d’Emmaus que sa foi devint ferme et vivante.

L’arrestation et le crucifiement du Seigneur l’avaient jeté dans de grands doutes et il s’était tenu plus à l’écart qu’avant. Je le vis aller à Emmaus avec Cléophas : je vis que, sans cesser la conversation, il cueillait ça et là sur le chemin des plantes médicinales et je méditais en même temps sur ce qu’il allait bientôt recevoir, de la main de Jésus que je voyais marcher derrière lui sans qu’il le sût, le remède par excellence, le pain de vie. Je vis toute la scène comme je l’avais déjà vue d’autres fois. Je vis que Marie Salomé les rencontra à leur retour et qu’ils se communiquèrent réciproquement ce qui leur était arrivé. Cette sainte femme était fille d’une sœur de sainte Anne.

Il écrivit son évangile par le conseil de Paul

Je ne me souviens plus si je le vis assister à l’Ascension de Jésus-Christ. Je le vis près de Jean lorsque celui-ci était à Éphèse et je le vis aussi près de Marie dans sa maison : je le vis ensuite avec André qui était venu d’Égypte pour voir Jean, et enfin dans sa patrie où il fit connaissance avec Paul qu’il accompagna.

Il écrivit son évangile par le conseil de Paul et parce qu’il courait des livres pleins de faussetés sur la vie du Seigneur. Il l’écrivit vingt-cinq ans après l’Ascension et presque toujours, d’après des renseignements recueillis partout auprès de témoins oculaires. Je l’avais déjà vu à l’époque de la résurrection de Lazare visiter les lieux où le Seigneur avait fait des miracles et s’enquérir de tout. Barsabas était du nombre des disciples qu’il connaissait.

J’ai appris que Marc aussi n’a écrit son Évangile que sur des relations de témoins oculaires et qu’aucun des Évangélistes n’a connu le travail des autres et n’en a fait usage pour le sien. Il m’a été dit aussi que, s’ils avaient tout écrit, ils auraient trouvé encore moins de créance, et que, pour ne pas allonger leur récit, ils n’ont pas mentionné les miracles qui se sont répétés fréquemment.

Je vis encore que Luc étant devenu évêque fut martyrisé à Thèbes, Si je ne me trompe : je vis qu’on l’attacha à un olivier par le milieu du corps et qu’on le tua là à coups de lance. Une lance lui ayant traversé la poitrine, la partie supérieure du corps tomba en avant : alors les bourreaux le redressèrent, l’attachèrent de nouveau et le percèrent encore de plusieurs coups. On lui donna la sépulture en secret pendant la nuit.

Le remède dont Luc se servait principalement dans les derniers temps où il exerça la médecine, était du réséda mêlé d’huile de palme et bénit. (…). Par son martyre subi contre un olivier, Luc a obtenu pour cet arbre et pour ses fruits une vertu curative liée à l’invocation de son nom. Employant l’huile fréquemment, il avait demandé à Dieu que sa mort sous l’olivier conférât à cet arbre de nouvelles vertus.

Des tableaux peints par saint Luc

Vision d’Anne Catherine Emmerich – 18 octobre 1821.

J’ai vu Luc peindre plusieurs portraits de la Sainte Vierge et quelquefois avec des circonstances miraculeuses. Un jour il travaillait à un portrait en buste de Marie : comme il ne pouvait pas en venir à bout, il pria, fut ravi en extase et quand il revint à lui il le trouva terminé.

Ce portrait se conserve à Rome, à l’église de Sainte-Marie Majeure, sur l’autel d’une chapelle qui est à droite du grand autel (image ci-contre). Mais ce n’est pas l’original : ce n’est qu’une copie. L’original est dans un pan de muraille auquel on a donné la forme d’un pilier : il a été caché là dans un moment de danger, avec d’autres objets sacrés parmi lesquels il y a des ossements de saints et des manuscrits d’une grande antiquité. Quand le prêtre dit Dominus Vobiscum à l’autel où est le portrait de Marie, sa main droite s’étend dans la direction du piller central où sont conservées ces reliques.

Photo de la Chapelle Borghesiana, dite aussi Chapelle Pauline, ou se trouve l’icône (Basilique Sainte-Marie Majeure, Rome)

Luc fit encore un portrait de la Sainte Vierge dans son costume de fiancée : je ne sais pas ce qu’il est devenu.
Il en fit un autre également en pied ou elle est en habits de deuil : je crois l’avoir vu dans l’église où est l’anneau nuptial de Marie (à Pérouse).

Vidéo du musée de la Cathédrale de San Lorenzo, à Pérouse (Italie)

Luc peignit aussi Marie allant assister à la descente de croix et cela se fit d’une façon merveilleuse. Lorsque tous les apôtres et les disciples eurent pris la fuite, je vis Marie se rendant près de la croix à la lueur du crépuscule : elle était accompagnée, je crois, de Marie de Cléophas et de Salomé. Je vis que Luc se tenait sur le chemin et que, tout ému de sa douleur, il présenta un linge en face d’elle comme elle passait, avec le désir que son image s’y imprimât. Je ne sais pas comment tout cela se fit : Luc ne fit pas toucher le linge à la Sainte Vierge et je crois que l’image s’y montra sans qu’il en eût connaissance. Il y trouva plus tard cette image semblable à une ombre qui passe, et il fit d’après elle son tableau où il y avait deux figures, lui-même avec le linge et Marie qui passait.

Vers ce même moment, peu d’heures après le crucifiement, plusieurs amis et disciples de Jésus contemplaient le suaire de Véronique où la face du Seigneur, avec toutes ses blessures et sa barbe ensanglantée, était reproduite en traits de sang épais et pourtant bien distincts. L’image imprimée sur le suaire était plus grande que la face elle-même, parce que le linge avait suivi tous les contours du visage. Luc se retira à la dérobée, tout plein d’angoisse et comme cherchant quelque chose : le linge qu’il tenait était, ainsi que le suaire, deux fois plus long que large. J’ignore ce qui poussa Luc à présenter son linge, si ce fut uniquement le désir que l’image de Marie s’y imprimât, ou s’il voulut suivre la coutume d’après laquelle on présentait un linge aux affligés ou remplir à l’égard de Marie l’office de charité exercé par Véronique envers Jésus.

J’ai vu l’image peinte par Luc existant encore chez une singulière peuplade habitant entre la Syrie et l’Arménie. Ce ne sont pas, à proprement parler, des chrétiens : ils croient à Jean-Baptiste et ils ont un baptême de pénitence qu’ils reçoivent chaque fois qu’ils veulent se purifier de leurs péchés.

Lire le chapitre sur le mandéisme du site Wikipédia

Le mandéisme est connu par les baptêmes que ses membres pratiquent dans le fleuve. Cette cérémonie serait quasiment inchangée depuis des millénaires, ce serait la même qu’aurait reçue Jésus de Jean-Baptiste. Des cérémonies de re-baptême ont encore lieu aux dates de fêtes où des centaines d’adeptes pénètrent dans l’eau en tunique blanche avant qu’un patriarche ne les immerge totalement. Le mandéisme privilégie Jean-Baptiste au détriment de Jésus.

Luc prêcha l’Évangile dans leur pays et opéra beaucoup de miracles avec cette image. Ils le persécutèrent et peu s’en fallut qu’ils ne le lapidassent : mais ils gardèrent l’image. Luc emmena avec lui douze d’entre eux qu’il avait convertis. Ces gens habitaient dans le voisinage d’une montagne qui est à peu près à douze lieues à l’est du Liban : il y a un cours d’eau qui descend de cette montagne et qui coule autour : cette eau est trouble et fangeuse. Ils logent dans de mauvaises cabanes, comme j’en ai vu en Égypte : ils ne sont pas les maitres du pays : ils y sont comme des esclaves et paient des redevances. J’ai entendu dans cette contrée dire quelque chose touchant Laodicée. À l’époque de saint Luc ils n’étaient guère plus de deux cents. Leur église est comme une grotte attenante à la montagne ; il faut descendre pour y entrer : on voit des coupoles dans le haut de même qu’on voit à la voute d’une église les ouvertures pratiquées pour les fenêtres.

J’ai encore vu là à une époque postérieure l’image de Marie peinte par saint Luc ; je ne sais pas si c’est l’époque actuelle, mais cela est bien possible, car du temps de saint Luc tout était plus simple. L’église me parut plus grande : il me sembla aussi qu’on y faisait d’autres cérémonies : le prêtre était assis sous une arcade devant un autel ; l’image était suspendue à la voute et plusieurs lampes étaient allumées devant elle. Elle était toute noircie et on ne distinguait plus rien. Ils reçoivent des grâces par le moyen de cette image et ils la révèrent parce qu’ils ont vu des miracles opérés par elle. Ils pratiquent la circoncision et croient que les âmes des morts passent dans d’autres corps, notamment dans ceux des enfants.

Ils ne connaissent plus bien leur origine ; ils descendent d’esclaves qui étaient venus au baptême de Jean avec des caravanes arabes et qui étaient repartis sans avoir eu connaissance d’autre chose que de ce baptême. Des restes de paganisme doivent s’être conservés chez eux, car ils ont des livres secrets contenant une espèce de révélation. Ils se livrent aussi à diverses pratiques magiques : ainsi ils brulent des objets appartenant à des gens qu’ils veulent par ce moyen ensorceler ou même faire mourir. Ils se placent au-dessus de la fumée pour se transporter ainsi dans des lieux éloignés.

Leurs prêtres se font sur la peau du bras des incisions en forme de croix : c’est peut-être parce que Jean Baptiste portait ordinairement un bâton surmonte d’une croix. Ils ont le plus souvent la poitrine nue et portent une pièce d’étoffe de poil de chameau jetée en travers sur les épaules. Ils ne savent pas les paroles que Jean annonçait en administrant le baptême ; ils disaient seulement : Je te baptise du baptême dont Jean baptisait. Je ne sais plus bien distinguer dans ce que je viens de raconter ce qui appartient au temps de saint Luc ou aux époques postérieures.

(Vincent) Il existe des copies d’autres peintures de saint Luc, qui ont d’ailleurs un style graphique similaire entre elles.

(Wikipédia) Luc Chrysoberges, patriarche de Constantinople, envoya l’icône comme cadeau au grand-prince Youri Dolgorouki de Kiev vers 1131.
Cette icône a été réalisée par le peintre Grégoire en utilisant le calque inversé (copie spéculaire) de l’icône de la Vierge, peinte par l’évangéliste saint Luc et qui, selon la tradition de Théodorus, lecteur à la basilique Sainte-Sophie de Constantinople, a été envoyé de Jérusalem avant 439 par Eudoxie, la femme de l’empereur Théodose II.

L’original de saint Luc serait actuellement la partie ronde du visage de l’icône de la Vierge du sanctuaire Montevirgine à Mercogliano en Italie.

Il existe d’autres copies de cet original : La plus ancienne copie et sans doute la plus proche de l’original a été découverte à l’église Sainte-Françoise-Romaine sur le Forum par Pico Cellini en 1950 (je n’ai pas trouvé d’image). Cette icône peinte à l’encaustique est la copie spéculaire – comme dans un miroir – (idem de celle de Vladimir) exécutée entre 438 et 439.

(Vincent) La plus ancienne icône de Jésus est celle-ci. Le style artistique semble assez différent des icônes de la Vierge par Saint Luc.

(Wikipédia) Cette icône a été restaurée en 1962. Elle est alors apparue nettement plus ancienne qu’on le pensait. Elle est désormais datée du règne de l’empereur byzantin Justinien, de la première moitié du VIe siècle.
Elle semble provenir de Constantinople, et a vraisemblablement été offerte par l’empereur au monastère Sainte-Catherine du Sinaï lorsqu’il l’a créé.

Le modèle iconographique du Christ pantocrator, de face et bénissant, était probablement fixé au Ve siècle selon plusieurs historiens de l’art, mais cette représentation en est la plus ancienne conservée.
Alors que la plupart des icônes existantes sont détruites aux VIIIe et IXe siècles pendant la période iconoclaste, cette icône demeure indemne.

La querelle des images

La période iconoclaste de l’Empire byzantin (dite « querelle iconoclaste » ou « querelle des images ») est une période qui s’étend de 726 à 843. Pendant environ une centaine d’années, les empereurs byzantins iconoclastes interdisent le culte des icônes et ordonnent la destruction systématique des images représentant le Christ ou les saints, qu’il s’agisse de mosaïques ornant les murs des églises, d’images peintes ou d’enluminures de livres.

Cette période de l’aniconisme chrétien se déroule dans un contexte politique difficile tant à l’intérieur, alors que plusieurs empereurs se succèdent en quelques années, que sur le plan extérieur où l’empire fait face aux invasions des Arabes et des Bulgares. Sur le plan religieux, elle constitue le prolongement de diverses hérésies survenues au cours des siècles précédents concernant la nature du Christ.

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